L’année de tous les dangers : Quels nouveaux modèles d’assurances pour couvrir les risques pandémiques et autres risques systémiques ?

Aug 11, 2021 | Digitalisation, Tendances, Uncategorized

Une pandémie toujours présente et qui s’aggrave sur le continent africain

Force est de constater, en dépit de signes positifs liés à la forte montée en puissance de la vaccination en particulier dans les pays les plus développés, que nous sommes loin d’en avoir fini avec la pandémie du COVID-19. Les signaux émanant en particulier du continent Africain sont alarmants.

D’après le quotidien Le Monde du 2 juillet 2021 en effet : « Depuis quinze jours, le continent enregistre des records de nouvelles contaminations, avec une augmentation de 39 % entre le 14 et le 20 juin et de 31 % du 21 au 28 juin, selon le CDC Afrique. Le chiffre de nouveaux cas (5,5 millions depuis le début de la pandémie) double désormais toutes les trois semaines, alors que le variant Delta se propage dans un nombre croissant de pays. Quant au nombre de décès dus au Covid-19, il s’établit à 142 993 pour l’ensemble du continent africain, ce qui représente 3,6 % du total mondial des décès. Par comparaison, les Etats-Unis pèsent pour 15,35 % de ce total mondial, le Brésil 13,1 %, l’Inde 10,15 % et la France 2,83 %. »

Les données sont claires : L’Afrique rentre dans une nouvelle vague de la pandémie qui pourrait s’avérer d’une particulière sévérité du fait des effets cumulés de la virulence du variant delta du virus en voie de dominance aujourd’hui sur les autres variants du virus et des conditions économiques, sociales et sanitaires de l’Afrique. Ainsi, 1% seulement des Africains sont vaccinés et d’après une étude récente du journal de référence. Bref, nous sommes loin d’en avoir fini.

Couvrir les nouveaux risques pandémiques et systémiques : Une situation qui devra changer

La pandémie de la COVID-19 a vivement relancé les débats autour de la couverture des risques systémiques ex. les pandémies et les questions autour des exclusions contractuelles de responsabilité des assureurs.

L’environnement global

En Europe, aux Etats-Unis et même en Afrique du Sud, de nombreux procès, cas litigieux, cas soumis aux autorités de réglementation portant en particulier sur les litiges autour du remboursement des pertes d’exploitation des PME-PMI du fait des mesures sanitaires et de « lockdown » ce sont multipliés depuis 2020.

Est-il possible et viable pour les assureurs de maintenir les positions actuelles sur la couverture des risques pandémiques ? Comment couvrir les risques systémiques et quels sont les enseignements de ce débat pour d’autres risques comme les risques climatiques, l’utilisation des modèles paramétriques, les positions des acteurs de l’écosystème assuranciel ? Comment assurer que les assureurs africains puissent éviter d’abîmer leur réputation et image tout en évitant des pertes ou fragilisations financières et possiblement le développement de nouveaux marchés/produits et opportunités commerciales ? Voilà autant de questions et de polémiques qui enflent.

Les débats concernent essentiellement :

  • Les assurances de garantie de pertes d’exploitation ;
  • Les assurances santé ;
  • Les assurances en cas de décès

Les débats les plus houleux portent en général sur la première et la dernière catégorie même si ces débats ont aussi été vifs sur la prise en charge des effets de la maladie par les systèmes de santé ex. aux USA.

Les mesures de santé publique nécessaires pour contenir la propagation du COVID-19 ont eu des effets dévastateurs pour de nombreuses entreprises du monde entier qui ont été contraintes de réduire leurs activités et/ou de s’adapter à l’évolution des préférences des consommateurs.

L’ampleur des pertes simultanées dans le monde entier et la complexité de la prévision des décisions de confinement prises par les gouvernements et des changements de comportement des consommateurs font qu’il est très difficile pour le secteur de l’assurance et de la réassurance d’assumer ce risque seul. En conséquence, les assureurs et les réassureurs veillent à ce que les exclusions du risque de pandémie soient sans ambiguïté dans les futurs contrats de plusieurs branches d’activité, ce qui a des répercussions sur le redressement de nombreux secteurs qui dépendent de cette couverture.

Les assureurs, réassureurs et les courtiers du monde entier ont essayé d’élaborer – parfois dans la douleur et avec grande difficultés comme en France – des cadres et modèles d’assurances contre les pandémies. Des discussions sur la structure d’éventuels programmes de partenariats public-privé pour les événements futurs tentent de voir le jour.

Quelles sont dès lors les possibles solutions ? 

Une solution publique-privée pour le risque de pandémie impliquant le secteur de l’assurance semblerait plus avantageuse que les prêts et subventions de crise accordés par les gouvernements, notamment en termes d’efficacité et d’équité ainsi que d’incitation à la réduction des risques. Elle offrirait également aux entreprises une prévisibilité quant à leur accès au financement en cas de future pandémie. Les marchés des capitaux pourraient fournir une source de capacité de financement supplémentaire par le biais du marché des titres liés à l’assurance, qui a l’expérience de la prise en charge du risque de pandémie.

Tirer les leçons de la crise du COVID-19 permettraient de réduire les impacts des pandémies futures et d’améliorer l’assurabilité. Il est probable que les épidémies de maladies infectieuses et les pandémies deviendront plus fréquentes en raison d’un certain nombre de facteurs sociaux, environnementaux et économiques. Une plus grande coordination et un meilleur partage de l’information sur la façon de mieux faire face à une pandémie, ainsi que l’établissement de protocoles, seraient des éléments clés pour limiter les impacts – et l’incertitude – d’une pandémie potentielle ou réelle. Un plus grand investissement dans la modélisation des conséquences financières des épidémies de maladies infectieuses, afin d’établir le niveau de confiance nécessaire à l’utilisation de celle ci dans les décisions de transfert de risques dans lesquels tant les assureurs que les gouvernements seront impliqués comme acteurs cruciaux.

Le secteur de l’assurance doit investir pour améliorer la disponibilité de produits innovants afin de répondre aux risques émergents auxquels sont confrontés ses clients, tout en s’assurant qu’il dispose des capacités et des connaissances nécessaires pour gérer les risques qu’il assume. Les gouvernements doivent faire preuve d’une plus grande vision stratégique dans la gestion des passifs éventuels auxquels ils sont confrontés pour des risques qui ne sont généralement pas assurés.

Des cadres juridiques existants depuis longtemps et une prolifération de cas juridiques et réglementaires pour un résultat contrasté 

En Afrique, et en particulier dans les pays qui sont régies par la Conférence Interafricaine des Marchés d’Assurances ou CIMA, le cadre juridique est bien établi par la réglementation supranationale appliquée de manière uniforme dans les Etats membres de la CIMA.

De nombreux cas juridiques se sont multipliés depuis de nombreux mois, souvent portés par des PME/PMI ou des entreprises du secteur du commerce, de la restauration, etc. tant au Royaume-Uni qu’en France ou aux Etats-Unis qui avaient subi de graves pertes d’exploitation liées aux obligations de fermeture obligatoire sur de longs mois – « lockdowns » imposées par les différentes autorités publiques, ont mis en lumière les difficultés et conflits pouvant survenir dans le cadre actuel et les besoins d’évolution. C’est d’autant plus fondamental dans la mesure où l’immense majorité des contrats d’assurance -plus de neuf sur dix des contrats- excluaient, comme en France, le risque pandémique de la garantie des pertes d’exploitation.

Les positions des autorités judiciaires et de réglementations varient. Pour ne considérer que l’Afrique :

  • En Afrique du Sud, l’autorité de régulation a tenté une approche double : négociations et discussions avec les assureurs et menace d’une investigation sur le secteur comme en Grande Bretagne.
  • Des tensions ont pu apparaître entre les assureurs et les autorités publiques sur ces questions comme ce fut le cas au Cameroun entre la CIMA et l’Association des compagnies d’assurances du Cameroun (ASAC) en 2020 autour de l’indemnisation des sinistres dû au Covid-19.

[1] Voir https://www.agenceecofin.com/assurance/2005-76800-la-cima-desapprouve-le-refus-des-assureurs-camerounais-d-indemniser-les-sinistres-lies-au-coronavirus

Couvrir les risques systémiques dont les pandémies : Les assurances paramétriques et indicielles sont-elles les solutions parfaites ?

Les solutions basées sur des modèles paramétriques et indiciels ont montré qu’elles pouvaient être très adaptées à des risques systémiques tels que les catastrophes naturelles, les risques liés au changement climatique, le secteur agricole.

L’assurance paramétrique ou assurance indicielle est un type d’assurance liée à un paramètre objectivable. Il peut s’agir d’un indice climatique (mais aussi d’une durée par exemple). Contrairement à une assurance classique, qui couvre les pertes réellement causées, l’assurance paramétrique est basée sur un montant forfaitaire et contractuel défini en amont. Dès le dépassement d’un certain seuil sur l’échelle indicielle, une indemnisation est déclenchée automatiquement.

L’assurance paramétrique possède dès lors de nombreux avantages :

  • Efficacité
  • Prix plus justes
  • Rapidité : avec le mécanisme déclencheur – ou « trigger» en anglais, l’indemnisation est déclenchée automatiquement: 
  • Transparence 

Mais, ce type de modèles ne sont pas toutefois sans problèmes. Et en particulier :

  • Complexité : le lancement d’un produit d’assurance paramétrique est loin d’être simple
  • Problème de l’exactitude des données et accès au nombre le plus large de données 
  • Risques non objectivables

Appliquer les modèles paramétriques aux pandémies ?

Concernant les épidémies et les pandémies, il est donc possible de développer des modèles de couverture de ces risques à base paramétriques, de définir un seuil clair et valable pour tous, à partir duquel il y a indemnisation du préjudice en particulier pour le cas de l’assurance de garantie des pertes d’exploitation. Concrètement, dans le cas d’une pandémie, ce seuil pourrait être l’annonce de la pandémie par l’Organisation Mondiale de la Santé par exemple. Le montant de l’indemnisation doit être défini le plus simplement possible pour rendre viable ces assurances.  Il pourrait s’agir du remboursement des frais de fonctionnement et des coûts salariaux pour une certaine période, par exemple un trimestre. Il est probable que les assurances santé individuelles seraient couvertes par les Etats dans les cadres des systèmes de protection sociale ou par des fonds publics/privés.

Les technologies numériques à la rescousse ?

 L’Afrique a une histoire de succès autour de la mobilisation des technologies numériques et de communications pour faire des sauts technologiques et offrir de nouveaux services à base numérique à ses populations. Le numérique a commencé de bouleverser l’assurance, qui reposait sur un fonctionnement immuable des siècles durant.

Le mobile, l’IoT, l’Intelligence Artificielle, la blockchain, ou les technologies des données contribuent au développement de nouveaux modèles et de nouveaux produits tant dans les secteurs B2C que B2B et B2B2C. L’assurance paramétrique, façonnée grâce au pouvoir des données et reposant sur leur large accès, exactitude, nombre et profondeur, s’inscrit complètement dans cette tendance.

Durant la pandémie, la transformation numérique s’est accélérée dans tous les domaines :

  • La traçabilité des cas de contamination via les données et communications mobiles ; la traçabilité et l’isolement des personnes contaminées ; le traçage géographique des cas et les évolutions utilisant mobiles, données et Intelligence artificielle;
  • L’identification des symptômes et des nouveaux symptômes utilisant les mobiles, les données, l’intelligence artificielle ;
  • Le partage en temps réel des dossiers médicaux électroniques de manière sécurisée utilisant le « blockchain » et l’accès et analyse en temps réel de millions de dossiers médicaux électroniques rendus anonymes combinant le « blockchain », etc.
  • Et bien sûr le travail à distance, les paiements à distance en particulier mobiles, etc. 

Quelles conclusions doit-on tirer ?

 La première conclusion à tirer de la pandémie du Covid 19 est que tirer les conclusions et leçons de ce qui est arrivé est fondamental tout comme de mettre en œuvre les réformes nécessaires pour dans le futur ne pas se retrouver de nouveau débordé.

Au-delà des nécessaires adaptations pour mieux appréhender les risques, il est évident qu’il sera de plus en plus difficile de simplement exclure les risques pandémiques et leurs conséquences en particulier en matière de garanties des dommages et pertes d’exploitation résultant de la pandémie et des décisions des autorités publiques adoptées pour les combattre. Des adaptations juridiques et réglementaires sont donc nécessaires. D’autre part, la mise en place de systèmes publics/privés pourraient permettre de créer le nécessaire arsenal pour amortir les chocs de manière anticipée et être déclenchés immédiatement dès le début de la pandémie.

Finalement, le développement de produits fondés sur les modèles paramétriques et indiciels ainsi que la considérable accélération de l’innovation et de la transformation numérique du secteur de l’assurance et une plus grande coopération au sein de l’écosystème assurantielle entre assureurs établis et startups.

                                                                                                                           Auteur: Jean-Stéphane GOUREVITCH

La pandémie du Covid-19 a donné une nouvelle urgence à des débats souvent difficiles, polémiques, qui ont pu entraîner des actions juridiques par rapport par exemple au refus d’indemnisation, comme nous le verrons. Du fait de la situation, les discussions sur les évolutions autour de l’indemnisation des risques pandémiques et au-delà, des risques systémiques par exemple liés aux changements climatiques, reprennent une nouvelle et urgente actualité. Nous évoquerons ici la situation actuelle, les enjeux, les contraintes réglementaires et juridiques, l’application de nouveaux « business models » comme les assurances paramétriques et indicielles, les exemples de start-ups, etc.

Une pandémie toujours présente et qui s’aggrave sur le continent africain

Force est de constater, en dépit de signes positifs liés à la forte montée en puissance de la vaccination en particulier dans les pays les plus développés, que nous sommes loin d’en avoir fini avec la pandémie du COVID-19. Les signaux émanant en particulier du continent Africain sont alarmants.

D’après le quotidien Le Monde du 2 juillet 2021 en effet : « Depuis quinze jours, le continent enregistre des records de nouvelles contaminations, avec une augmentation de 39 % entre le 14 et le 20 juin et de 31 % du 21 au 28 juin, selon le CDC Afrique. Le chiffre de nouveaux cas (5,5 millions depuis le début de la pandémie) double désormais toutes les trois semaines, alors que le variant Delta se propage dans un nombre croissant de pays. Quant au nombre de décès dus au Covid-19, il s’établit à 142 993 pour l’ensemble du continent africain, ce qui représente 3,6 % du total mondial des décès. Par comparaison, les Etats-Unis pèsent pour 15,35 % de ce total mondial, le Brésil 13,1 %, l’Inde 10,15 % et la France 2,83 %. »

Les données sont claires : L’Afrique rentre dans une nouvelle vague de la pandémie qui pourrait s’avérer d’une particulière sévérité du fait des effets cumulés de la virulence du variant delta du virus en voie de dominance aujourd’hui sur les autres variants du virus et des conditions économiques, sociales et sanitaires de l’Afrique. Ainsi, 1% seulement des Africains sont vaccinés et d’après une étude récente du journal de référence. Bref, nous sommes loin d’en avoir fini.

Couvrir les nouveaux risques pandémiques et systémiques : Une situation qui devra changer

La pandémie de la COVID-19 a vivement relancé les débats autour de la couverture des risques systémiques ex. les pandémies et les questions autour des exclusions contractuelles de responsabilité des assureurs.

L’environnement global

En Europe, aux Etats-Unis et même en Afrique du Sud, de nombreux procès, cas litigieux, cas soumis aux autorités de réglementation portant en particulier sur les litiges autour du remboursement des pertes d’exploitation des PME-PMI du fait des mesures sanitaires et de « lockdown » ce sont multipliés depuis 2020.

Est-il possible et viable pour les assureurs de maintenir les positions actuelles sur la couverture des risques pandémiques ? Comment couvrir les risques systémiques et quels sont les enseignements de ce débat pour d’autres risques comme les risques climatiques, l’utilisation des modèles paramétriques, les positions des acteurs de l’écosystème assuranciel ? Comment assurer que les assureurs africains puissent éviter d’abîmer leur réputation et image tout en évitant des pertes ou fragilisations financières et possiblement le développement de nouveaux marchés/produits et opportunités commerciales ? Voilà autant de questions et de polémiques qui enflent.

Les débats concernent essentiellement :

  • Les assurances de garantie de pertes d’exploitation ;
  • Les assurances santé ;
  • Les assurances en cas de décès

Les débats les plus houleux portent en général sur la première et la dernière catégorie même si ces débats ont aussi été vifs sur la prise en charge des effets de la maladie par les systèmes de santé ex. aux USA.

Les mesures de santé publique nécessaires pour contenir la propagation du COVID-19 ont eu des effets dévastateurs pour de nombreuses entreprises du monde entier qui ont été contraintes de réduire leurs activités et/ou de s’adapter à l’évolution des préférences des consommateurs.

L’ampleur des pertes simultanées dans le monde entier et la complexité de la prévision des décisions de confinement prises par les gouvernements et des changements de comportement des consommateurs font qu’il est très difficile pour le secteur de l’assurance et de la réassurance d’assumer ce risque seul. En conséquence, les assureurs et les réassureurs veillent à ce que les exclusions du risque de pandémie soient sans ambiguïté dans les futurs contrats de plusieurs branches d’activité, ce qui a des répercussions sur le redressement de nombreux secteurs qui dépendent de cette couverture.

Les assureurs, réassureurs et les courtiers du monde entier ont essayé d’élaborer – parfois dans la douleur et avec grande difficultés comme en France – des cadres et modèles d’assurances contre les pandémies. Des discussions sur la structure d’éventuels programmes de partenariats public-privé pour les événements futurs tentent de voir le jour.

Quelles sont dès lors les possibles solutions ? 

Une solution publique-privée pour le risque de pandémie impliquant le secteur de l’assurance semblerait plus avantageuse que les prêts et subventions de crise accordés par les gouvernements, notamment en termes d’efficacité et d’équité ainsi que d’incitation à la réduction des risques. Elle offrirait également aux entreprises une prévisibilité quant à leur accès au financement en cas de future pandémie. Les marchés des capitaux pourraient fournir une source de capacité de financement supplémentaire par le biais du marché des titres liés à l’assurance, qui a l’expérience de la prise en charge du risque de pandémie.

Tirer les leçons de la crise du COVID-19 permettraient de réduire les impacts des pandémies futures et d’améliorer l’assurabilité. Il est probable que les épidémies de maladies infectieuses et les pandémies deviendront plus fréquentes en raison d’un certain nombre de facteurs sociaux, environnementaux et économiques. Une plus grande coordination et un meilleur partage de l’information sur la façon de mieux faire face à une pandémie, ainsi que l’établissement de protocoles, seraient des éléments clés pour limiter les impacts – et l’incertitude – d’une pandémie potentielle ou réelle. Un plus grand investissement dans la modélisation des conséquences financières des épidémies de maladies infectieuses, afin d’établir le niveau de confiance nécessaire à l’utilisation de celle ci dans les décisions de transfert de risques dans lesquels tant les assureurs que les gouvernements seront impliqués comme acteurs cruciaux.

Le secteur de l’assurance doit investir pour améliorer la disponibilité de produits innovants afin de répondre aux risques émergents auxquels sont confrontés ses clients, tout en s’assurant qu’il dispose des capacités et des connaissances nécessaires pour gérer les risques qu’il assume. Les gouvernements doivent faire preuve d’une plus grande vision stratégique dans la gestion des passifs éventuels auxquels ils sont confrontés pour des risques qui ne sont généralement pas assurés.

Des cadres juridiques existants depuis longtemps et une prolifération de cas juridiques et réglementaires pour un résultat contrasté 

En Afrique, et en particulier dans les pays qui sont régies par la Conférence Interafricaine des Marchés d’Assurances ou CIMA, le cadre juridique est bien établi par la réglementation supranationale appliquée de manière uniforme dans les Etats membres de la CIMA.

De nombreux cas juridiques se sont multipliés depuis de nombreux mois, souvent portés par des PME/PMI ou des entreprises du secteur du commerce, de la restauration, etc. tant au Royaume-Uni qu’en France ou aux Etats-Unis qui avaient subi de graves pertes d’exploitation liées aux obligations de fermeture obligatoire sur de longs mois – « lockdowns » imposées par les différentes autorités publiques, ont mis en lumière les difficultés et conflits pouvant survenir dans le cadre actuel et les besoins d’évolution. C’est d’autant plus fondamental dans la mesure où l’immense majorité des contrats d’assurance -plus de neuf sur dix des contrats- excluaient, comme en France, le risque pandémique de la garantie des pertes d’exploitation.

Les positions des autorités judiciaires et de réglementations varient. Pour ne considérer que l’Afrique :

  • En Afrique du Sud, l’autorité de régulation a tenté une approche double : négociations et discussions avec les assureurs et menace d’une investigation sur le secteur comme en Grande Bretagne.
  • Des tensions ont pu apparaître entre les assureurs et les autorités publiques sur ces questions comme ce fut le cas au Cameroun entre la CIMA et l’Association des compagnies d’assurances du Cameroun (ASAC) en 2020 autour de l’indemnisation des sinistres dû au Covid-19.

[1] Voir https://www.agenceecofin.com/assurance/2005-76800-la-cima-desapprouve-le-refus-des-assureurs-camerounais-d-indemniser-les-sinistres-lies-au-coronavirus

Couvrir les risques systémiques dont les pandémies : Les assurances paramétriques et indicielles sont-elles les solutions parfaites ?

Les solutions basées sur des modèles paramétriques et indiciels ont montré qu’elles pouvaient être très adaptées à des risques systémiques tels que les catastrophes naturelles, les risques liés au changement climatique, le secteur agricole.

L’assurance paramétrique ou assurance indicielle est un type d’assurance liée à un paramètre objectivable. Il peut s’agir d’un indice climatique (mais aussi d’une durée par exemple). Contrairement à une assurance classique, qui couvre les pertes réellement causées, l’assurance paramétrique est basée sur un montant forfaitaire et contractuel défini en amont. Dès le dépassement d’un certain seuil sur l’échelle indicielle, une indemnisation est déclenchée automatiquement.

L’assurance paramétrique possède dès lors de nombreux avantages :

  • Efficacité
  • Prix plus justes
  • Rapidité : avec le mécanisme déclencheur – ou « trigger» en anglais, l’indemnisation est déclenchée automatiquement: 
  • Transparence 

Mais, ce type de modèles ne sont pas toutefois sans problèmes. Et en particulier :

  • Complexité : le lancement d’un produit d’assurance paramétrique est loin d’être simple
  • Problème de l’exactitude des données et accès au nombre le plus large de données 
  • Risques non objectivables

Appliquer les modèles paramétriques aux pandémies ?

Concernant les épidémies et les pandémies, il est donc possible de développer des modèles de couverture de ces risques à base paramétriques, de définir un seuil clair et valable pour tous, à partir duquel il y a indemnisation du préjudice en particulier pour le cas de l’assurance de garantie des pertes d’exploitation. Concrètement, dans le cas d’une pandémie, ce seuil pourrait être l’annonce de la pandémie par l’Organisation Mondiale de la Santé par exemple. Le montant de l’indemnisation doit être défini le plus simplement possible pour rendre viable ces assurances.  Il pourrait s’agir du remboursement des frais de fonctionnement et des coûts salariaux pour une certaine période, par exemple un trimestre. Il est probable que les assurances santé individuelles seraient couvertes par les Etats dans les cadres des systèmes de protection sociale ou par des fonds publics/privés.

Les technologies numériques à la rescousse ?

 L’Afrique a une histoire de succès autour de la mobilisation des technologies numériques et de communications pour faire des sauts technologiques et offrir de nouveaux services à base numérique à ses populations. Le numérique a commencé de bouleverser l’assurance, qui reposait sur un fonctionnement immuable des siècles durant.

Le mobile, l’IoT, l’Intelligence Artificielle, la blockchain, ou les technologies des données contribuent au développement de nouveaux modèles et de nouveaux produits tant dans les secteurs B2C que B2B et B2B2C. L’assurance paramétrique, façonnée grâce au pouvoir des données et reposant sur leur large accès, exactitude, nombre et profondeur, s’inscrit complètement dans cette tendance.

Durant la pandémie, la transformation numérique s’est accélérée dans tous les domaines :

  • La traçabilité des cas de contamination via les données et communications mobiles ; la traçabilité et l’isolement des personnes contaminées ; le traçage géographique des cas et les évolutions utilisant mobiles, données et Intelligence artificielle;
  • L’identification des symptômes et des nouveaux symptômes utilisant les mobiles, les données, l’intelligence artificielle ;
  • Le partage en temps réel des dossiers médicaux électroniques de manière sécurisée utilisant le « blockchain » et l’accès et analyse en temps réel de millions de dossiers médicaux électroniques rendus anonymes combinant le « blockchain », etc.
  • Et bien sûr le travail à distance, les paiements à distance en particulier mobiles, etc. 

Quelles conclusions doit-on tirer ?

 La première conclusion à tirer de la pandémie du Covid 19 est que tirer les conclusions et leçons de ce qui est arrivé est fondamental tout comme de mettre en œuvre les réformes nécessaires pour dans le futur ne pas se retrouver de nouveau débordé.

Au-delà des nécessaires adaptations pour mieux appréhender les risques, il est évident qu’il sera de plus en plus difficile de simplement exclure les risques pandémiques et leurs conséquences en particulier en matière de garanties des dommages et pertes d’exploitation résultant de la pandémie et des décisions des autorités publiques adoptées pour les combattre. Des adaptations juridiques et réglementaires sont donc nécessaires. D’autre part, la mise en place de systèmes publics/privés pourraient permettre de créer le nécessaire arsenal pour amortir les chocs de manière anticipée et être déclenchés immédiatement dès le début de la pandémie.

Finalement, le développement de produits fondés sur les modèles paramétriques et indiciels ainsi que la considérable accélération de l’innovation et de la transformation numérique du secteur de l’assurance et une plus grande coopération au sein de l’écosystème assurantielle entre assureurs établis et startups.

                                                                                                                           Auteur: Jean-Stéphane GOUREVITCH